Appels à contributions

Appel à contributions pour le numéro intitulé « Imaginaires techniques : ce que l’image fait au geste »

 

Présentation du numéro

Fondée en 1995 par Dominique Janicaud, Noesis est une revue généraliste de philosophie publiée par le Centre de Recherches en Histoire des Idées. Édités en format papier, diffusés par la Librairie Vrin, les numéros de la revue sont également accessibles sur OpenEdition deux ans après la date initiale de parution.

Directeur de publication : Sébastien Poinat (CRHI – Université Côte d’Azur)

Direction du numéro : Thomas Morisset (CRHI – Université Côte d’Azur) & Marie Schiele (Deutsches Forum für Kunstgeschichte, Paris)

Cet appel à contribution prolonge les journées d’études sur le même thème qui se sont tenues les 17 & 18 octobre 2023 à l’Université Côte d’Azur. Si cette publication s’ancre d’abord en philosophie de l’art et de la technique, elle est par son objet même ouverte à l’interdisciplinarité. Ainsi, les contributions venues d’autres disciplines, comme l’histoire de l’art et des techniques, l’anthropologie ou les différentes sciences des arts seront les bienvenues.

 

Argumentaire

        Appartenant à la langue commune et à plus forte raison à la langue scientifique, la notion d’imaginaire semble aller de soi, comme en témoignent les nombreuses publications qui la mobilisent [Pérez, 2014]. L’imaginaire renverrait alors plus ou moins précisément à un ensemble de représentations symboliques, parfois collectives qu’il s’agirait d’énumérer et d’ordonner. Mais cet usage descriptif et cumulatif de la notion, bien loin d’en épuiser le sens, tend à prendre le pas sur un usage plus ferme et plus tranché théoriquement, qui jalonne une partie de l’histoire des idées de la seconde moitié du XXe siècle. Introduit par Sartre dans un ouvrage éponyme en 1940, l’imaginaire traduit une réflexion sur le rapport de la conscience à l’irréel, rapport compris comme un mode particulier d’intentionnalité. Contre Sartre, c’est une autre relation de l’image à la vie psychique que Bachelard mobilise dans ses ouvrages sur la matière élémentaire, où il s’agit de penser des mouvements oniriques et des images théoriques à partir de leur matériau. C’est cette conception générative de l’imaginaire que Gilbert Durand reprend à son compte dans les Structures anthropologiques de l’imaginaire en évoquant « le trajet symbolique » des images, entre « pulsion subjective […] et les intimations objectives émanant du milieu cosmique et social. » [Durand, 1984, p. 38]. Mise à mal, notamment par le courant structuraliste, la notion d’imaginaire confrontée à celle de mythologie est âprement discutée par Barthes par exemple comme forme travestie d’idéologie, qui ne saurait faire l’économie d’une critique. Autant de partis-pris théoriques qui esquissent les traits d’une notion riche mais assez insaisissable, polarisée entre des acceptions très distinctes, de la structure et de l’activité mentales à l’élaboration d’une « culture de l’imaginaire », désignant dans les études littéraires, la science-fiction et la fantasy.

         S’il n’est pas question de proposer un panorama des différentes conceptions de l’imaginaire, pas plus qu’une généalogie critique, l’objet de cette publication, sans faire fi de considérations terminologiques essentielles pour préciser le propos, se situe davantage autour d’une mise en exercice de la notion, soit l’évaluation de ce qu’elle permet de penser : la formation des images, leur expérience et leurs effets sur la conduite d’une action, sur l’effectuation d’un geste, et de façon réflexive, sur la compréhension des choses.

 

          À cette focalisation heuristique, s’ajoute une focalisation thématique signalée par l’inscription dans un champ particulier, celui de la technique. Ce recentrement sur l’imaginaire technique ou plutôt sur les imaginaires techniques dans leur pluralité, vise à travailler de façon plus rigoureuse le rapport entre geste et image, afin de comprendre comment le registre kinesthésique mobilisé par les efforts techniques participe d’une culture générale de notre sensibilité et de nos facultés de représentation. On souhaite explorer ce rapport de différentes manières :

 -          En examinant la fonction et l’influence des images mentales ou discursives, racontées, lues sur l’effectuation d’un geste et la gestion de l’effort.

-          De façon corollaire, en étudiant le type d’images associées à la technique lui conférant une certaine intelligibilité, une certaine fonction et une certaine valeur dans les textes d’une culture donnée.

 

            L’hypothèse, au stade préliminaire des recherches et qui constitue la raison d’être de cette publication, consiste à mettre en évidence que l’imaginaire ne correspond pas à un synonyme ou à un dérivé de l’imagination, c’est-à-dire à une faculté productrice d’images, mais qu’il renvoie à une qualité de liaison entre les images, susceptible d’élaborer un ensemble cohérent et effectif, modulant un geste, agissant comme une médiation cognitive nécessaire permettant de palier certaines insuffisances de l’expérience.

 

            Les propositions d’article pourront s’inscrire dans l’un des axes suivants, qui ne sont pas limitatifs :

 -          Ce que l’image fait au geste : on s’intéressera ici à l’influence des images (discursives, concrètes ou mentales) sur la compréhension, la saisie et l’effectuation des gestes, tant du point de vue d’une expérience réussie que d’une expérience troublée. Pareil dialogue entre geste et image étant tributaire du milieu technique au sein duquel il s’effectue (par exemple, l’atelier de l’artisan et sa recherche du « geste imaginatif » [Sennett, 2010], la transmission des gestes propres aux arts vivants ou encore les gestes induits par les pratiques des industries culturelles comme les jeux vidéo et par les nouvelles technologies en général qui supposent un univers iconique dans lequel un geste physique est étendu) il s’agira de faire droit aux particularités sensibles de ces différents contextes. Dans quelle mesure la médiation de l’imagé et du métaphorique est-elle nécessaire dans le processus d’acquisition d’un geste ? Ces images sont-elles isolées et ponctuelles ou un imaginaire se dégage-t-il de leur prolifération ? Et au-delà de cet aspect pédagogique, dans quelle mesure la consistance vécue des gestes et efforts tient-elle à l’image qui aide à les cerner ? Et de quelle manière la part non-imagée des efforts participent aussi à la constitution d’un imaginaire technique, dans la mesure où la forme d’un effort peut devenir une manière imagée de parler d’un autre effort, par rapprochement et comparaison ? Corollairement, que reste-t-il de cette dimension kinesthésique et rythmique des gestes dans le passage aux images, dans la constitution d’un imaginaire technique ? Comment apprécier cette transformation au-delà d’une conception réductrice des images selon laquelle la dynamique gestuelle serait irrémédiablement convertie en une série d’idéogrammes ?

 -          De la justesse technique des images : A travers cette dernière question, on se retrouve confronté à une question bien plus large : à supposer que l’image donne une consistance sensible à l’effort ou au geste technique, cette consistance est-elle pour autant technique ? Cette médiation sensible de la technique semble appartenir à ce que Simondon nomme un « mode mineur » [Simondon, 2012, 123 et suiv.] de la relation aux techniques, souvent ésotérique car lié au jargon propre à chaque métier et fondamentalement irrationnel. Quelle est la justesse technique qui rend ces images opératoires pour la compréhension de la technique elle-même et non seulement comme « trucs pédagogiques » ? De quelles manières ces imaginaires techniques participent-ils d’une véritable culture technique ? Par exemple, lorsque nous « naviguons » dans un « bureau » avec des « fenêtres ouvertes » face à notre écran d’ordinateur, pareil imaginaire nous permet-il d’accéder à une relation technique avec l’ordinateur ou bien cela nous la masque-t-il irrémédiablement ? Plus largement c’est la relation entre technique et fiction qui est interrogée : alors que la condition moderne de la technique est souvent pensée par son rapprochement avec la science, la fiction peut-elle constituer un rapport bien réglé à ce qu’est la technique ?

 -          Sur la spécificité de l’imaginaire technique : Cette journée essaye donc de penser ensemble à la fois l’imaginaire des gestes techniques liés à des métiers que celui des gestes techniques d’usage, dans des contextes quotidiens, ludiques, voir fictionnels. Cette diversité des situations concernées par notre étude pose une question majeure : comment ces différents imaginaires communiquent-ils ? Si c’est bien une certaine qualité de liaison qui est à la racine d’un imaginaire, y a-t-il une qualité qui lierait les fictions sur l’intelligence artificielle, le geste du charpentier et les prouesses sportives ? Ou bien est-ce que ce caractère général, sinon universel, est précisément ce qui échappe à la notion d’imaginaire technique, qui garderait toujours un ancrage dans les pratiques particulières ?

 

Calendrier & Consignes

 1er février 2024 : date limite d’envoi des propositions d’article.

 15 février 2024 : envoi des notifications d’acceptation ou de refus aux auteur.rices

 1er juin 2024 : envoi de la v1 des articles pour évaluation.

 Fin septembre 2024 : retour des évaluations.

 15 novembre 2024 : envoi des versions définitives des articles.

 Les propositions d’article, d’une longueur comprise entre 400 et 600 mots, accompagnées d’une courte notice biographique, sont à envoyer pour le 1er février 2024 à thomas.morisset[at]univ-cotedazur.fr et à mschiele[at]dfk-paris.org. L'acceptation du résumé ne présume pas de l'acceptation de l'article définitif, soumis à une relecture en double aveugle.

 

Les articles définitifs devront comporter 40 000 signes, espaces compris, avec une marge de tolérance de plus ou moins 20 % et seront accompagnés d’un résumé strictement inférieur à 800 signes, espaces compris. Seuls les articles en français sont acceptés.

 

Bibliographie indicative :

 -          Gaston Bachelard, L’Air et les Songes. Essai sur l’imagination du mouvement, Paris, Le Livre de Poche, 2014.

- Gaston Bachelard, L’Eau et les Rêves. Essai sur l’imagination de la matière, Paris, Le Livre de Poche, 1942.

 -          Roland Barthes, Mythologies, Paris, Editions du Seuil, 2014.

 -          Pierre Cassou-Noguès, Technofictions, Paris, Éditions du Cerf, 2019.

 -          Marianne Chouteau & Cécile Nguyen (dir.), Mises en récit de la technique. Regards croisés, Paris, Éditions des Archives contemporaines, 2011.

 -          Gilbert Durand, Les structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Éditions Bordas, 10ème édition, 1984.

 -          Cynthia Fleury, Métaphysique de l’imagination, Paris, Gallimard, 2000.

 -          Imagination, imaginaire, imaginal, Cynthia Fleury (dir.), Paris, P.U.F., 2006.

 -          Anne-Françoise Garçon, L’imaginaire et la pensée technique, Classiques Garnier, 2012

 -          Philippe Hamon, Imageries. Littérature et image au xixe siècle, Paris, José Corti, 2001.

 -          Donna Haraway, « A Cyborg Manifesto: Science, Technology and Socialist-Feminism in the Late Twentieth Century », in Simians, Cyborgs and Women. The Reinvention of Nature, London, Free Association Books, 1991.

 -          Yuk Hui, La question de la technique en Chine, Paris, Divergences, 2021.

 -          Wolfganf Iser, Das Fiktive und das Imaginäre, Perspektiven literarischer Anthropologie, Suhrkamp Verlag, 2001.

 -          Les Imaginaires et les techniques, Fabian Kröger et Marina Maestrutti (dir.), Paris, Presses des Mines, Collection Sciences de la conception, 2018.

 -          Imaginaires Technologiques, François Sebbah et Alberto Romele (dir.), Dijon, Les presses du réel, 2023.

 -          Magdalena Marciniak, « Le mot imaginaire chez Roland Barthes », Cités, 2018/3 (N° 75), p. 121-132. Disponible en ligne : https://www.cairn.info/revue-cites-2018-3-page-121.htm

 -          Claude-Pierre Pérez, « L’imaginaire » : naissance, diffusion et métamorphoses d’un concept critique, Paris, « Littérature », Armand Colin, 2014/1, n°173, p. 102-116. Disponible en ligne : https://www.cairn.info/revue-litterature-2014-1-page-102.htm

 -          Jean-Paul Sartre, l’Imaginaire, Paris, Tel, Gallimard, 1940.

 -          Richard Senett, Ce que sait la main, Paris, Albin Michel, 2010.

 -          Gilbert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, Paris, Éditions Aubier, 2012.

 -          Jean Starobinski, « L’Empire de l’imaginaire », la relation critique, L’œil vivant II, Paris, Tel Gallimard, 2001.

 -          Gérard Toffin, « La fabrique de l’imaginaire », L’Homme [En ligne], 221 | 2017, mis en ligne le 01 mars 2019, URL : http://journals.openedition.org/lhomme/30101

 -          Jean-Jacques Wunenberger, l’Imagination, mode d’emploi ? Une science de l’imaginaire au service de la créativité, Paris, Éditions Manucius, 2014.

 

 

Appel à contributions pour le numéro 44 « Les théories de la culture dans la philosophie allemande »

Victor Béguin, Alexandre Fillon (dir.)

 

L’appel porte sur quatre contributions pour le numéro 44 de la revue Noesis, qui sera consacré aux théories de la culture dans la philosophie allemande, entre le début du XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, et qui paraîtra en 2024.

 

Les contributions retenues viendront enrichir la publication des actes de journées d’études qui se sont tenues sur ce thème en 2022, à l’Université Côte d’Azur. Afin que le numéro soit le plus complet et le plus diversifié possible, nous ne retiendrons pas de propositions sur les auteurs suivants, pour lesquels nous disposons déjà de contributions : Herder, W. von Humboldt, Hegel, Nietzsche, Weber, Rickert, Rosenzweig, Cassirer et Husserl. Toute autre proposition de contribution s’inscrivant dans les axes de recherche présentés ci-dessous, entre le début du XIXème siècle et la première partie du XXème siècle, sera considérée avec attention.

 

Présentation du numéro de la revue

Les théories de la culture connaissent en Allemagne un essor exceptionnel à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle. L’Auflkärung, ainsi que de grands écrivains comme Klopstock, Lessing, Goethe et Schiller, contribuent de manière décisive au développement d’une intense réflexion sur culture. Cet effort pour développer une authentique théorie philosophique de la culture traverse la plupart des mouvements intellectuels du XIXème siècle : les systèmes de l’idéalisme allemand, le romantisme, l’herméneutique et la philologie, les écoles néokantiennes, la philosophie de Nietzsche, ou encore les fondateurs de la sociologie moderne. Cet héritage immense permet de donner sens à la revendication d’une véritable philosophie de la culture dans la première partie du XXe siècle, chez des penseurs aussi différents que Georg Simmel ou Ernst Cassirer. L’élaboration du concept de culture constitue ainsi un enjeu fondamental pour la pensée allemande de cette période, pour lequel on observe un intérêt croissant de la recherche récente. Ce numéro de la revue Noesis se propose de contribuer à ces recherches sur l’histoire de la philosophie allemande et des sciences humaines, en accueillant des contributions qui devront s’inscrire dans les axes suivants :

 

1. Pluralité terminologique et conceptuelle de l’idée de « culture ». Il conviendra d’abord de réfléchir sur les différents modes d’appréhension et de conceptualisation de l’idée de culture. Il existe en effet dans la pensée allemande de cette période une grande diversité de théories sur la culture qui fait sa richesse inépuisable. Cette diversité s’appuie tout particulièrement sur la complexité sémantique de la langue allemande. Là où le français, comme d’autres langues, utilise parfois comme des synonymes « culture » et « civilisation », l’allemand distingue quant à lui trois termes : « Zivilisation », « Bildung » et « Kultur ». Le premier mot ayant souvent, chez ces penseurs, une connotation critique, pour des raisons à la fois linguistiques et historiques, on mesure la difficulté à traduire en français « Kultur », que le choix porte sur « culture » ou « civilisation ». Cette spécificité de la langue allemande ouvre la voie à une véritable originalité dans la manière de conceptualiser les phénomènes culturels. L’un des enjeux de ce numéro sera notamment de circonscrire avec précision l’idée de Bildung. Souvent traduite par « formation » ou « éducation », cette notion a pu être mobilisée, grâce à sa richesse et sa plasticité sémantique, pour donner sa forme propre à l’idée d’une « culture allemande ». Si elle s’est constituée depuis le début du XIXe siècle en authentique tradition, l’idée de Bildung fait néanmoins l’objet de critiques philosophiques importantes, qui permettent de mieux appréhender la cohérence de ces diverses théories.

 

2. La place du concept de culture au sein des systèmes philosophiques. Il conviendra également d’étudier la place qu’accordent les différentes philosophies à la culture dans leur questionnement. Si l’idéal de formation (Bildung) de l’humanité par la médiation de ses activités spirituelles joue un rôle certain dans l’anthropologie philosophique de l’Auflkärung, quelle place occupe la culture au sein des systèmes de l’idéalisme allemand ? On observe notamment sur cette question une certaine extension de l’importance du concept de culture pour la philosophie qu’il s’agit d’interpréter : la pensée de Wilhelm von Humboldt s’oriente ainsi pleinement autour du concept de Bildung, la nature de la tâche philosophique se trouve également redéfinie, chez Nietzsche ou chez Cassirer, en référence à la culture.

 

3. Langage, langues et culture. Une des spécificités des théories de la culture dans la pensée allemande réside dans l’insistance particulière sur le rôle du langage, l’influence de la diversité des langues dans la formation des cultures et dans la manière de définir conceptuellement celles-ci, ainsi que le formule de manière significative Humboldt : « La dispersion de l’espèce humaine en peuples et en groupes ethniques est en relation étroite avec la diversité des langues et des idiomes ; ces deux phénomènes sont soumis à leur tour à un troisième, d’un niveau plus élevé, savoir : à la capacité que possède la dynamique spirituelle de l’humanité de se produire en exhibant des formes (Bildungen) toujours nouvelles et souvent mieux élaborées » [1] ». Si la culture signifie un processus permettant de donner forme à la vie humaine, de la façonner, suivant la logique inscrite dans le mot de Bildung, ce processus s’effectue par la création continue de médiations nécessaires, et les langues semblent être une médiation privilégiée. Antoine Berman a en ce sens montré comment le processus de formation et de totalisation de soi de la culture ne se déploie qu’en passant par ce qui est autre et extérieur, par l’étranger, notamment par la médiation de la traduction [2]. La traduction est à la fois une pratique constitutive de la culture allemande, le moyen effectif par lequel elle s’est développée, et un paradigme pour la penser, pour comprendre comment, pour se former soi-même, pour atteindre la forme qui est appropriée à un soi, il est nécessaire de faire l’expérience de ce qui est autre que soi. De manière plus structurelle, qu’il s’agisse de Herder, de Cassirer ou d’autres philosophies, la culture est constamment pensée en corrélation avec le langage et les langues.

 

4. Sciences humaines et anthropologie philosophique. Un autre axe portera sur les influences complexes entre les théories philosophiques de la culture, le développement des enquêtes ethnographiques, l’émergence de l’anthropologie contemporaine, et plus largement des différentes sciences humaines du XIXe siècle. Si ces théories de la culture demeurent philosophiques, elles se nourrissent toutefois de l’exceptionnel développement scientifique des différentes sciences humaines au cours de cette période. Pour élaborer sa théorie du langage et son anthropologie philosophique, Wilhelm von Humboldt a ainsi pu bénéficier du développement de la linguistique comparée et surtout de l’exceptionnelle documentation ethnographique que lui rapportait son frère, Alexander, lors de ses différentes expéditions en Amérique du Sud. De manière générale, les philosophies de la culture portent une attention particulièrement importante aux différents travaux de l’anthropologie naissante, aux sciences historiques, à la sociologie, et participent activement à l’élaboration théorique des Kulturwissenschaften, ainsi que l’atteste notamment la participation de Rickert, Windelband, Simmel, Cassirer, Husserl, Weber et Wölfflin à la revue Logos, Internationale Zeitschrift für Philosophie der Kultur, parue entre 1910 et 1933. Cet axe s’inscrira dans les recherches actuelles sur les transformations des disciplines savantes et la circulation des concepts entre la philosophie et les sciences humaines, qui, tout au long de la période considérée, s’en détachent progressivement tout en continuant d’entretenir de féconds rapports avec elle.

 

5. Philosophie de l’éducation et histoire des institutions universitaires. La polysémie du terme « Bildung », qui signifie à la fois « culture » et « éducation », le place au coeur des débats extrêmement fournis sur les enjeux, les moyens et les finalités de l’éducation au cours de la période considérée. On a pu par exemple interpréter les débats sur la pédagogie au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle comme étant structurés par l’opposition entre les partisans de la « Gelehrsamkeit » (acquisition de compétences tournées vers l’exercice d’un métier, notamment dans l’administration) et ceux de la « Bildung » (élévation au-dessus de la nature par une éducation qui concerne « l’homme entier ») [3]. En outre, les notions de Kultur et de Bildung ont également été réinscrites dans l’histoire de la bourgeoisie germanique cultivée, et notamment de sa composante proprement universitaire (dans les travaux de Koselleck, Kocka et Ringer). Toute contribution portant sur les débats de philosophie de l’éducation ou de pédagogie, ainsi que sur le rapport entre des constructions conceptuelles singulières et des tendances intellectuelles et universitaires plus larges, sera considérée avec attention.

 

 


[1] L’Épreuve de l’étranger. Culture et traduction dans l’Allemagne romantique, Paris, Gallimard, 1984.

[2] Introduction à l’oeuvre sur le Kavi, § 2, trad. P. Caussat, Paris, Seuil, 1974, p. 143.

[3] Voir W. H. Bruford, The German tradition of self-cultivation : "Bildung" from Humboldt to Thomas Mann, Cambridge, Cambridge University Press, 1975.

 

 

Modalités de soumission :

La date limite d’envoi des propositions est fixée au 31 août 2023. Elles doivent être adressées aux coordinateurs du numéro : Victor Béguin (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.) et Alexandre Fillon (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.).

Les propositions doivent comporter : un titre, un résumé d’environ 4000 signes, la fonction et l’affiliation institutionnelles de son auteur.e, ainsi qu’une adresse électronique. Les contributions retenues ne devront pas comporter plus de 40 000 signes (espaces compris) et seront à envoyer avant le 29 février 2024.

 

 

 

 

 

Appel à contributions pour le numéro 39 de la revue Noesis à paraître à l’automne 2022 : « La connaissance incertaine et ses vertus »

 Coordinateurs : Grégori Jean, Sébastien Poinat

 Argumentaire

  La question du rapport entre connaissance et incertitude peut être posée de deux manières. 1/ il est d’abord possible de s’intéresser à la connaissance que l’on peut avoir de phénomènes qui présentent en eux-mêmes une forme d’incertitude. Ainsi l’économie étudie-t-elle la notion de risque : risques liés aux comportements des agents économiques, aux évolutions du marché, ou même à la possibilité de catastrophes environnementales, sanitaires, etc. De même, la physique pourra s’intéresser à des phénomènes qui sembleront intrinsèquement aléatoires (comme les phénomènes quantiques). Dans ces deux exemples, c’est l’objet de la connaissance qui est lui-même « incertain », et non la connaissance que l’on en prend. Du reste, la connaissance de l’incertain peut être elle-même extrêmement rigoureuse et solide, et en ce sens certaine.

 2/ La connaissance incertaine, en revanche, désigne une connaissance qui porte en elle la possibilité d’erreurs, d’imprécisions, dont les affirmations ne sont pas forcément définitives, qui ne se limite pas aux propositions certaines mais travaille avec des hypothèses ou sur la base d’énoncés seulement plausibles. Alors que, dans le premier cas, l’incertitude caractérisait ce qu’il y avait à connaître, elle caractérise ici la connaissance elle-même.

 Or c’est précisément cette « connaissance incertaine » que le numéro de Noesis souhaite interroger, sans présumer des liens, internes ou externes, qu’elle est susceptible d’entretenir avec des « objets » eux-mêmes incertains.

  Traditionnellement, la connaissance se trouve conçue comme infaillible, productrice de vérités, et ce faisant marquée par la certitude. Ainsi, dans les Règles pour la Direction de l’Esprit, Descartes affirme explicitement et de façon parfaitement univoque que la certitude est une détermination essentielle de la connaissance : la connaissance est certaine, ou n’est pas. Cette thèse, affirmée dans la deuxième règle, commande l’ensemble de l’ouvrage : les résultats douteux, les énoncés seulement probables, les raisonnements plausibles, même si le doute est peu important, même si la probabilité est très haute, ou le raisonnement très convaincant, ne peuvent pas prétendre appartenir au domaine scientifique : de tels raisonnements doivent être écartés purement et simplement.

 Pour Descartes, la certitude ne définit pas seulement la connaissance scientifique : il fait aussi jouer à la certitude un rôle majeur dans le domaine de la métaphysique. Ainsi, dans les Méditations Métaphysiques, il commence par considérer comme faux et par écarter toutes les propositions qui comportent quelque doute, érigeant ainsi la certitude absolue en critère de la vérité. Le doute hyperbolique de Descartes emporte ainsi toutes les propositions que l’ego ne peut saisir avec une entière et parfaite certitude.

 En un sens, la position cartésienne peut apparaître comme un prolongement assez naturel de la conception traditionnelle de la connaissance. Selon cette conception, la connaissance s’oppose fondamentalement à l’opinion. Cette dernière est changeante, douteuse, et si elle est vraie, c’est plutôt par chance que pour de solides raisons. Au contraire, la connaissance suppose non seulement la vérité mais aussi la capacité de donner les raisons qui font tenir une proposition pour vraie. Celui qui sait, sait pourquoi il sait, et s’avère donc être sûr de son savoir. Si on oppose la connaissance à l’opinion, la certitude n’est-elle pas forcément une caractéristique essentielle de la connaissance ?

 Le numéro de Noesis intitulé « La connaissance incertaine et ses vertus » propose de prendre le contre-pied de la conception traditionnelle de la connaissance. Il vise d’abord à explorer l’hypothèse que la connaissance peut être incertaine, sans changer de nature et déchoir de son statut de connaissance (en devenant simple opinion). Du côté de la science moderne, on trouve ainsi au XVIIe siècle chez les savants de la Royal Society, l’affirmation que la science est affaire d’hypothèses plus ou moins probables. Certes, les expériences permettent de les contrôler et parfois de les rendre très probables, mais on ne peut pas savoir si telle ou telle hypothèse ne sera pas démentie un jour par une nouvelle expérience. Pour Boyle, Hooke et les membres de la Royal Society, les démonstrations mathématiques productrices de certitude sont non seulement assez rares, mais surtout dépendantes de principes physiques ou d’hypothèses, ce qui rend seulement probables leurs conclusions. Selon les auteurs de la Royal Society, le type de connaissance qui prévaut en science peut ainsi être considéré comme intermédiaire : ce n’est ni la connaissance parfaitement certaine, telle qu’on la trouve en mathématique, ni la simple opinion. A la même époque, une réflexion sur les degrés de certitude était à l’œuvre dans le domaine juridique, où la notion de « doute raisonnable » jouait un rôle central. Pour pouvoir juger une affaire, il n’est pas nécessaire d’avoir des démonstrations et des preuves absolument infaillibles. On peut se contenter d’atteindre un niveau de certitude qui dépasse les doutes raisonnables, sans atteindre le plus haut niveau. Un faisceau de preuves, des témoignages crédibles, ne sont pas des preuves infaillibles mais ils peuvent conférer une certitude suffisante (ou une incertitude acceptable).

 Comme les éléments précédents le montrent, soutenir la thèse selon laquelle une connaissance (scientifique, juridique) peut être incertaine n’implique pas d’adopter une forme de scepticisme, en tout cas pas une forme très affirmée. La connaissance incertaine, si elle existe, est bien une connaissance et en affirmant que la connaissance peut être incertaine, il ne s’agit pas du tout de nier qu’il soit possible de connaître. La thèse sceptique la plus proche est celle que Richard Popkin, dans son Histoire du Scepticisme, de la fin du Moyen-Âge à l’aube du XIXe siècle, appelle « le scepticisme modéré » ou « constructif ».

 Le premier questionnement du volume portera ainsi sur la possibilité de penser une connaissance qui soit incertaine, sur les présupposés théoriques d’une telle notion ainsi que sur ses enjeux, mais aussi sur ses difficultés, voire ses limites.

 Au-delà de la possibilité de définir une connaissance qui soit incertaine, il s’agira également de réfléchir aux vertus de cette connaissance, en la comparant à la connaissance classique, prise dans les limites de la certitude. A l’opposé de la thèse cartésienne, Karl Popper a ainsi soutenu dans La Logique de la découverte scientifique que l’exigence de certitude était un frein considérable au progrès scientifique. Les théories scientifiques, disait Popper, sont d’audacieuses conjonctures, et non pas du tout une synthèse d’affirmations certaines :

 « Le vieil idéal scientifique de l’épistémê, l’idéal d’une connaissance absolument certaine et démontrable s’est révélé être une idole. […] Avec l’idole de la certitude […] tombe l’une des défenses de l’obscurantisme, lequel met un obstacle sur la voie du progrès scientifique. Car l’hommage rendu à cette idole non seulement réprime l’audace de nos questions, mais en outre compromet la rigueur et l’honnêteté de nos tests. La conception erronée de la science se révèle dans la soif d’exactitude. Car ce qui fait l’homme de science, ce n’est pas la possession de connaissances, d’irréfutables vérités, mais la quête obstinée et audacieusement critique de la vérité. »[1]

 

 Conformément à la perspective adoptée ici par Popper, ce numéro de Noesis visera également à explorer l’hypothèse selon laquelle l’incertitude de la connaissance n’est pas un défaut dont il faudrait s’accommoder, mais une caractéristique positive, qui ouvre des perspectives constructives. On pourra aussi se demander si la connaissance incertaine, précisément parce qu’elle est libérée de certains réquisits méthodologiques trop lourds liés à l’exigence de certitude, n’est pas en mesure de se frayer des chemins inattendus. De manière plus générale, le deuxième questionnement du volume portera sur la possibilité que la connaissance incertaine puisse se montrer parfois plus pénétrante dans ses visées, plus audacieuse, ou plus innovante, que la connaissance certaine.

 Cet appel à contribution s’inscrit dans le prolongement d’un colloque qui s’est tenu à Nice les 18, 19 et 20 novembre 2021 et qui a abordé les questions précédentes à partir de plusieurs disciplines : la philosophie, mais aussi la médecine, la psychanalyse, l’archéologie, la géographie, la physique et la chimie. L’appel à contribution souhaite conserver le caractère pluridisciplinaire du colloque : dès lors qu’elles abordent au moins certaines des questions ci-dessus, les contributions hors philosophie sont les bienvenues.

 

Soumission des contributions

 Les contributions, rédigées en français, doivent comprendre :

  ·        Le titre de l’article

  ·        L’article de 40 000 signes (espaces compris) + ou – 20%

  ·        Son résumé (800 signes, espaces compris, maximum)

  ·        Le nom de l’auteur ou des auteurs

  ·        Une présentation succincte de l’auteur ou des auteurs (100 mots maximum)

  Elles seront envoyées au format pdf à Grégori JEAN (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.) ou à Sébastien POINAT : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 Les propositions feront l’objet d’une double lecture à l’aveugle par le comité de rédaction de la revue Noesis.

 Date limite d’envoi des articles : 15 mai 2022

 Les réponses seront communiquées le 15 juillet 2022

 


[1] Karl Popper, Logik der Forschung, Vienne : Springer, 1934, trad. fr. par N. Thyssen-Rutten & P. Devaux, La Logique de la découverte scientifique, Paris : Payot, 1973 (avec les appendices), p.282.

 

 

 

Appel à contributions pour le numéro 37 de la revue Noesis à paraître au printemps 2022 –  L'objectivité en mathématiques
Coordinateurs :
Paola Cantù, Brice Halimi, Gerhard Heinzmann, Frédéric Patras

De l’Antiquité jusqu’au XIXe siècle, les principaux objets des mathématiques étaient les nombres, les grandeurs et les figures qui, souvent, étaient pensés comme entités extralinguistiques, existant indépendamment de nos représentations d’eux dans un monde abstrait, conçu en analogie avec le monde physique et désignés par des termes singuliers du langage mathématique. Se pose néanmoins le problème classique de notre contact avec ce monde d’objets qui ne sont ni dans l’espace ni dans le temps et avec lesquels nous ne pouvons pas établir une relation causale (problème de Benacerraf).

Dans la querelle des universaux du Moyen-Âge, on opposait à un tel réalisme le conceptualisme et le nominalisme. La solution « conceptualiste » porte en mathématiques souvent le nom « intuitionnisme » selon lequel les entités mathématiques n'existent pas indépendamment de notre pensée (l'antiréalisme) ou existent indépendamment de nous, mais ne sont connaissables que par construction. Ainsi, selon l’approche conceptualiste, les mathématiques doivent se plier à une exigence de construction et risquent donc être restrictives par rapport aux mathématiques standard.

La solution nominaliste porte en mathématiques le nom « formalisme ». Le point essentiel du formalisme est une vue sur la nature du langage, à savoir qu’il peut servir de guide à la pensée. Le formalisme défend une conception instrumentaliste du langage par rapport à son utilisation dans le raisonnement. Cette conception instrumentaliste permet de faire un usage purement symbolique de signes dans notre raisonnement, c’est-à-dire indépendamment de leur contenu sémantique. Or, si les mathématiques sont interprétées comme une syntaxe de signes non interprétés, autrement dit comme des systèmes formels, il faut que l’on dispose d’une démonstration de non-contradiction de ces systèmes. A la suite de la preuve limitative de Gödel en 1931, on a en général (mis à part les constructivistes) abandonné la théorie de la démonstration réductrice (c.-à-d. envisageant une démonstration de non-contradiction absolue) en faveur de ce que Dag Prawitz a appelé théorie générale de la démonstration, qui analyse la dérivabilité dans un calcul donné, détermine la complexité des preuves, ou établit des résultats de consistance relative.

En fait, ni platoniciens, ni formalistes, ni nominalistes ou constructivistes ne parviennent à justifier les vérités mathématiques de manière convaincante lorsqu’ils essaient de les déterminer à travers des critères ontologiques, sémantiques ou opérationnels totalement dissociés de la pratique mathématique. En réalité, l’objectivité des mathématiques n’est pas à mesurer à l’aune d’une objectivité préconçue indépendamment de l’activité concrète du « working mathematician » : c’est là sans doute la légitimité de ce qu’on appelle aujourd’hui la « philosophie de la pratique mathématique ».

Contrairement aux objets physiques, en effet, les objets mathématiques ne sont pas conçus comme des singuliers ayant des propriétés virtuellement indéfinies et non pertinentes, mais comme des concepts, correspondant soit à des axiomes, soit aux propriétés et aux relations constitutives d’une structure visée (laquelle n’est pas nécessairement conçue comme existant indépendamment de nos définitions et constructions). On rejoint ici le fait que l’objectivité mathématique n’est jamais séparable des cadres symboliques qui en permettent la formulation exacte. Elle ne consiste pas en des structures qui seraient directement accessibles telles quelles, au moyen de quelque intuition. Car les représentations symboliques qui permettent par exemple d’écrire un groupe de permutations comme agissant sur un certain ensemble d’items notés a, b, c, …, ne sont pas de simples artefacts ou un simple à-côté psychologique : elles constituent la présentation même (Darstellung) des structures qu’elles formulent.

La confusion des mathématiques avec une connaissance d’objets abstraits provient du mythe d’un rapport direct à des objets mathématiques, que ces objets soient des structures indépendantes (pour le platoniste) ou (pour le formaliste) les signes mêmes qui font l’écriture mathématique. L’objectivité mathématique se situe au contraire dans l’entre-deux des structures et des signes. En particulier, l’opposition entre ce qui serait objectif en tant qu’indépendant de nous, et ce qui serait subjectif car opéré par nous, n’est sans doute pas pertinente pour comprendre l’objectivité propre aux mathématiques. Qu’on en juge : les fictions mathématiques que sont par exemple le point à l’infini de la géométrie projective ou la variation infinitésimale dx du calcul différentiel ne sont pas moins objectives du fait d’être adossées au système de règles formelles que nous fixons pour en régir l’emploi – preuve que l’objectivité mathématique n’est pas l’opposé des opérations « subjectives » qui la mettent en jeu au sein d’une pratique symbolique.

Toutefois, l’objectivité mathématique peut-elle être ainsi conçue comme constituant une objectivité sui generis ? Car alors comment continuer à faire d’elle un modèle d’objectivité en général – ce qu’elle a toujours aussi été, pour la théorie de la connaissance ? Voilà un exemple du genre de questions auquel nous aimerions pouvoir consacrer ce numéro de Noesis.

Soumission des contributions

Les contributions, rédigées en français ou en anglais, doivent comprendre :

·         Le titre de l’article

·         L’article de 20000 à 40000 signes (espaces compris)

·         Son résumé (700 signes, espaces compris, maximum)

·         Le nom de l’auteur ou des auteurs

·         Une présentation succincte de l’auteur ou des auteurs (100 mots maximum)

Elles seront envoyées au format pdf à l’un des éditeurs invités, avec copie aux trois autres : 
Paola Cantu <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>, Brice Halimi <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser., Gerhard Heinzmann <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>, Frederic Patras <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>

Les propositions feront l’objet d’une double lecture à l’aveugle.

Date limite d’envoi des articles :  1er Mai 2021

Les réponses seront communiquées à fin Juin 2021.

 

English version
Call for contribution - Noesis n°37 - " Objectivity in mathematics "
Dir. :
Paola Cantù, Brice Halimi, Gerhard Heinzmann, Frédéric Patras

From antiquity to the 19th century, the main objects of mathematics were numbers, magnitudes and figures, which were often thought of as extralinguistic entities, existing independently of our representations of them in an abstract world, conceived in analogy with the physical world, and designated by singular terms in mathematical language. Yet, a classical problem is how we access this world of objects that are neither in space nor in time and with which we cannot establish a causal relationship (Benacerraf's problem).

In the medieval dispute on universals, such realism was opposed to conceptualism and nominalism. The "conceptualist" solution is often referred to in mathematics as "intuitionism", according to which mathematical entities do not exist independently of our thinking (anti-realism), or exist independently of us, but are only knowable by construction. Thus, according to the conceptualist approach, mathematics must obey a construction requirement, and therefore risks being restrictive compared to standard mathematics.

The nominalist solution is called "formalism" in mathematics. The essential point of formalism is to view language as a guide to thought. Formalism defends an instrumentalist conception of language in relation to its use in reasoning. This instrumentalist conception allows a purely symbolic use of signs in reasoning, that is to say, independently of their semantic content. However, if mathematics is interpreted as a syntax of uninterpreted signs, in other words as formal systems, we need a demonstration of the non-contradiction of these systems. Following Gödel's incompleteness theorems in 1931, envisaging a demonstration of absolute non-contradiction was generally (apart from the constructivists) abandoned in favor of what Dag Prawitz called the general theory of demonstration, which analyses the derivability in a given system, determines the complexity of the proofs, or establishes results of relative consistency.

In fact, neither Platonists, nor formalists, nor nominalists or constructivists succeed in convincingly justifying mathematical truths when they try to determine them through ontological, semantic or operational criteria totally dissociated from mathematical practice. In reality, the objectivity of mathematics is not to be measured against a preconceived objectivity independently of the concrete activity of the "working mathematician": this is undoubtedly the legitimacy of what is today called the "philosophy of mathematical practice".

Contrary to physical objects, indeed, mathematical objects are not conceived of as singulars with virtually undefined and irrelevant properties, but as concepts, corresponding either to axioms or to the properties and relations constitutive of a targeted structure (which itself is not necessarily conceived as existing independently of our definitions and constructions). We join here the fact that mathematical objectivity is never separable from the symbolic frameworks that allow its exact formulation. It does not consist of structures that would be directly accessible just as they are, by means of some intuition. For example, the symbolic representations that allow one to write a group of permutations as acting on a certain set of items written a, b, c, ..., are not superficial auxiliary devices or mere psychological artefacts: they constitute the very presentation (Darstellung) of the structures they formulate.

The confusion of mathematics with knowledge of abstract objects comes from the myth of a direct relationship to mathematical objects, be they independent structures (for the Platonist) or (for the Formalist) the very signs that make up mathematical writing. On the contrary, mathematical objectivity lies in the in-between of structures and signs. In particular, the opposition between what would be objective as being independent of us, and what would be subjective as being operated by us, is probably not relevant to understand the objectivity proper to mathematics. Let us judge for ourselves: mathematical fictions such as, for example, the point at infinity in projective geometry, or the infinitesimal variation dx in differential calculus, are no less objective because they are based on the system of formal rules that we fix to govern their use - proof that mathematical objectivity is not the opposite of the "subjective" operations that bring it into play within a symbolic practice.

However, can mathematical objectivity be conceived of in this way as sui generis? For then how can we continue to view it as a model of objectivity in general - which it has always been, in theory of knowledge? This is an example of the kind of questions to which we would like to devote this issue of Noesis.

Submission of contributions

Contributions, written in English or French, should include:

    - The title of the article

    - The article from 20000 to 40000 signs (spaces included)

    - An abstract (700 signs, including spaces, maximum)

    - The name of the author(s)

    - A brief presentation of the author(s) (100 words maximum)

They will be sent in pdf format to one of the invited editors, with a copy to the other three: Paola Cantu <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>, Brice Halimi <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>, Gerhard Heinzmann <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>, Frederic Patras <Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.>

Proposals will be subject to a double blind reading.

Deadline for submission of papers: May 1, 2021.

Responses will be communicated by June 30, 2021.

 



Appel à contributions pour le numéro 33 de la revue Noesis à paraître au printemps 2020 –
Philosophie du droit coutumier

La revue Noesis, revue du Centre de Recherches en Histoire des Idées de l’Université de Nice, lance un appel à contributions pour un double volume intitulé Philosophie du droit coutumier, à paraître au printemps 2020. Cette publication fait suite au colloque « Enjeux philosophiques du droit coutumier », organisé en mai 2018 à l’Université de Nice Sophia Antipolis, avec le soutien de l’Université Côte d’Azur, la MSH-Sud Est et l’UFR LASH. Les articles sélectionnés après cet appel viendront compléter un ensemble d’articles sélectionnés parmi ceux présentés durant le colloque.

Argumentaire

Loin de considérer l’expression de « droit coutumier » comme une évidence, il s’agira de relever et, autant que possible, de résoudre les tensions que crée la juxtaposition de deux formes de régulation du social aussi proches que lointaines : le droit et la coutume. Pour ce faire, on s’interrogera notamment sur l’ambiguïté qui se cache derrière le qualificatif de « coutumier » : a-t-il pour fonction de désigner une manifestation parmi d’autres du juridique, ou bien désigne-t-il une forme à part du juridique, qui possèderait ses propres caractéristiques et qui ne serait pas totalement réductible au droit ?

La réponse à ces questions dépend très certainement d’une exploration aussi empirique que théorique du mode de fonctionnement spécifique au droit coutumier. Si ce droit est dit coutumier, c’est évidemment parce que la coutume y occupe une place privilégiée en tant que source du droit. Comprendre la différence spécifique du droit coutumier, c’est donc s’efforcer de comprendre comment la place de la coutume conditionne la nature même de ce droit.

Il faudra donc s’interroger sur la façon dont la place centrale accordée à la coutume détermine l’existence d’institutions spécifiques et de critères à part entière de l’établissement de ce que sont les droits des individus. Tout système de droit, dès l’instant qu’il comporte un élément coutumier, doit établir les principes spatio-temporels et logiques de la preuve de la coutume. La Common Law anglo-saxonne et ses principes spécifiques ne doivent cependant pas éclipser derrière eux toute tentative de saisir ce que peuvent être les principes et les spécificités du droit coutumier, et l’on restera particulièrement attentifs à la façon dont le droit coutumier prend sa place dans des contextes pluralistes, où plusieurs droits coutumiers peuvent se retrouver en concurrence. Dans ces conditions, l’interaction entre droit et coutume prend la forme d’un conflit normatif plutôt que celle d’un « droit coutumier » unifié.

Explorer les limites et le caractère fictionnel des procédures relatives à la coutume de la Common Law peut servir de point de départ pour redéployer les potentialités du droit coutumier, et en interroger les fondements. Notamment, il serait intéressant d’étudier les formes diverses que prend le droit coutumier à une époque où le modèle de la Common Law s’impose à différentes échelles et dans différents domaines, notamment dans le droit international, et où le droit coutumier se déploie dans des contextes de pluralisme juridique au sein de régions décolonisées. Les enjeux spécifiques rencontrés dans ces contextes ne peuvent que permettre d’interroger les limites et la plasticité du droit coutumier. Les changements d’échelles et de domaines touchent-ils à l’essence du droit coutumier, si tant est qu’il en ait une ? Révèlent-elles au contraire une certaine nature du droit coutumier, au-delà de ses incarnations spécifiques ? Il s’agira entre autres de saisir l’efficace spécifique du droit coutumier, et notamment de déterminer si le droit coutumier repose sur les mêmes formes de contraintes que le droit, et s’il dispose de modes d’institutions et d’application spécifiques. La question de la place de la sanction est dans ce cas essentielle.

Dans le prolongement de ces réflexions, il est nécessaire de noter que dans tout droit dit coutumier, la coutume est réduite à n’être qu’une source du droit, et en tant que telle se voit privée d’être une forme de normativité indépendante. N’est coutume que la coutume reconnue comme telle, selon les processus requis et au nom des institutions et des critères que le droit définit. Dans ce cas, la coutume n’est qu’une des sources possibles du droit, en concurrence avec d’autres, et cette dernière n’a d’existence juridique que secondaire.

C’est la raison pour laquelle John Austin a pu si facilement disqualifier l’autonomie de la coutume, argumentant avec Hobbes contre l’école historique que la nature même du droit empêche la coutume d’avoir un efficace propre en dehors de la reconnaissance directe ou indirecte, explicite ou tacite, du souverain. L’une des ambitions principales de ce colloque serait justement d’évaluer la justesse de l’affirmation austinienne, ce qui pourrait permettre de fournir une réponse à la question de la priorité du substantif ou du qualificatif dans l’expression « droit coutumier ». En sous-bassement se trouve la question même de l’autonomie de la coutume comme forme de régulation sociale.

Pour ce faire, nous pourrions être amenés à considérer ce qui disparaît et ce qui reste de la coutume dans le droit coutumier, afin de comprendre réellement la nature de ce dernier. Cela ne peut que nous conduire à nous interroger sur le thème spécifique de la codification de la coutume, acte fondateur du droit coutumier. Cette codification n’est jamais, de fait, un acte neutre, et il serait des plus pertinent de mettre en lumière, sous les angles les plus divers possibles, toutes les tensions qui entourent cette codification, cristallisant des équilibres de pouvoir ou des luttes socio-économiques. Un axe d’étude intéressant, déjà beaucoup évoqué en sciences sociales mais rarement en philosophie, serait celui des interactions entre le droit formel et coutume dans les pays décolonisés.

La codification du droit est d’ailleurs l’un de ces moments où savoirs et pouvoirs se rencontrent avec le plus d’intensité. L’école historique du droit a affirmé avec force la nécessité d’entourer l’étude du droit de celle des humanités, que l’on peut élargir aujourd’hui à l’ensemble des sciences humaines et sociales, de l’anthropologie à l’économie, en passant par la sociologie. On s’interrogera donc sur la place que ces disciplines peuvent occuper dans la codification et l’établissement de la coutume, sur la légitimité et sur les méthodes de leur approche.

Enfin, la question se pose évidemment de la place à donner à l’étude d’exemples spécifiques. Il est évident qu’ils devront être centraux dans l’étude de l’objet que constitue le droit coutumier, mais qu’aucune réflexion ne peut cependant se limiter à proposer des monographies de droits coutumiers différents.

La liste suivante de questions, non-exhaustive, permet de lancer les pistes auxquelles les contributions pourront s’efforcer de répondre :

L’expression de « droit coutumier » désigne-t-elle un mode de régulation sociale spécifique, entre le juridique et le coutumier ? La coutume est-elle une source à part du droit ? La coutume peut-elle être considérée comme un en-deçà ou un au-delà du droit ?

Y-a-il une « forme » spécifique du droit coutumier malgré la diversité de ses manifestations ? Y a-t-il un modèle du droit coutumier, comme pourrait l’être le droit international ?

Quelles transformations la coutume subit-elle quand elle intègre le « droit coutumier » ? Quels enjeux philosophiques la codification de la coutume dans le droit coutumier soulève-t-elle ? Quels sont les enjeux de l’existence du droit coutumier dans des cadres pluralistes/décolonisés ? Quels sont les rapports du droit coutumier avec des standards à la fois moraux et juridiques comme le sont les droits de l’homme par exemple ? Quelle est la place du droit coutumier au sein de la dynamique du changement social ?

Quelles interactions et quels enjeux de pouvoir y a-t-il entre les sciences humaines et sociales et le droit autour de la question de la coutume ? Quels liens le droit coutumier entretient-il avec les localités, leurs territoires, leurs histoires et leurs organisations sociales ? Comment les différentes disciplines des sciences humaines et sociales permettent-elle de rendre compte de ces dynamiques, et de leur conflit avec le formalisme du droit ?

Informations pratiques

Les articles complets pourront faire environ 35000 signes, en ne comptant que le corps du texte (titre, résumés, notes etc. ne rentrant pas dans ce compte). La revue n’évaluera pas de simples propositions. Les articles pourront être écrits en anglais, en français et en italien exclusivement. Pour plus de détails, veuillez consulter notre fiche de style.

Les articles devront être envoyés en triple aux adresses suivantes : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.">Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..fr, à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. et à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. et ce pour le 1er juin 2019.

Pour favoriser la neutralité de la sélection, il est également demandé que le document, sous format Word ou OpenOffice (.doc) soit anonyme, et transmis dans une pièce jointe à un message électronique indiquant quant à lui le nom et les coordonnées de l’auteur-e. Une réponse sera donnée à partir du 1er août 2019.

Il sera alors éventuellement demandé aux auteur-e-s dont les articles auront été sélectionnés d’y apporter quelques modifications. La version finale des articles sera transmise à la revue le 15 septembre 2019, dernier délai.


English version

For more than 20 years, the peer-reviewed journal Noesis has been at the forefront of French contemporary philosophy. Affiliated to the Center for Research in the History of Ideas (CRHI) of the University of Nice Sophia Antipolis, Noesis publishes two special editions a year, collecting paper around a topic chosen by its scientific committee. The Philosophy of Customary Law will be the name of the Spring 2020 double issue. It follows the organization of a conference on the “Philosophy of Customary Law” in May 2018.

The call

Far from considering the phrase "customary law" as a self-evident truth, papers will aim at identifying and trying to solve the many tensions created by the juxtaposition of two separate but parallel forms of social regulation: law and custom. What matters then is to investigate the ambiguity behind the very idea of customary law. Does it point out one more sort of law, or does it designate an autonomous kind of law, with its own features and not reducible to the law?

Answering these questions requires without any doubts an enquiry about the peculiar dynamics of customary law, grounded on both empiricist and theoretical perspectives. To know whether it is a form among others of law or it is specific enough to be called a genus of law, it is crucial to define its principles. If this law is called customary it is because custom is key to it as a source of law. Understanding the specific features of customary law means therefore striving to understand what role custom plays to shape the very nature of customary law.

It will be necessary to investigate the way the main role assigned to customs determines the very existence of specific institutions and peculiar criteria of the bigger law frame that regulates the individual. Any legal system that includes custom as its element must establish spatial, temporal and logical frame of custom proofs. Nevertheless, Anglo-Saxon Common law and its peculiar principles mustn't overshadow any attempt to grasp the principles and the peculiarities of customary law; and we will be particularly sensitive to the way the customary law settles in pluralist contexts, where different customary laws can be concurrent. In these conditions the interaction between law and custom takes the shape of a normative conflict more than of a coherent customary law.

Exploring the limits and the fictions of customary procedures adopted by the Common Law could be the first step of both a new deployment of the customary law potential and an enquiry about its foundations. Indeed, it would be of extreme interest to study the different forms of customary law in eras where the Common Law model is spreading at different levels and domains, especially in international law, and where customary law is adopted in de-colonized regions where the law system is marked by a strong plurality of contexts.

Peculiar stakes of these contexts force to investigate both the limits and the flexibility of customary law. Do evolutions of scales and domains concern the essence of customary law, if this nature exists? Or are they only variations of a single nature beyond the peculiarities of each embodiment?  It will also be necessary - among other issues - to address the specific effectiveness of customary law, and to determine if it lays on the same constraint as the law; and if it is supported by peculiar institutions and applications. The question of the role of the sanction is in this respect essential.

In the wake of these reflections it is necessary to note that custom is reduced to the status of simple source of the law in every law called customary, and is therefore deprived of every autonomous form of normative power. It is not custom that is not acknowledged as custom according to the processes required and in the name of the institutions and criteria defined by law. In this case, custom is not anything more than one of the many possible sources of law, and concurring with them; it has not a primary juridical existence.

This is the reason why John Austin could so easily disqualify custom self-sufficiency, arguing - with Hobbes and against the historical school - that the very nature of law prevents custom to be effective on its own besides the implicit or explicit, direct or indirect acknowledgement by the sovereign. One of the main ambitions of this collective publication would be indeed to question Austin's position. This could in turn allow to address the issue of the substantial or accessory priority of the phrase "customary law". Beyond this lies the very issue of the autonomy of custom as a social regulation tool.

In order to do that, one could be tempted to consider what disappears of custom and what does not, in customary law, so as to really understand its very nature. This brings us to discuss the specific subject of the codification of custom, the cornerstone of customary law. This codification is never de facto a neutral act, and it will be more relevant to point out from every point of view all the implicit tensions of the codification, which standardize and stabilize power balances or social and economic struggles. One of the axes of the study, already well known in social science but overlooked by philosophy, would be that of interaction between formal law and custom in de-colonized countries.

Legal codification is one of these moments when powers and knowledge meet with most intensity. The “historical school” of law maintained the necessity of combining law studies with humanities, and we can now include social sciences such as economy, anthropology and sociology. We will therefore investigate which place these disciplines can or should have within the codification and definition of custom; we will also enquiry about their legitimacy, methods and approaches. 

The question arises of which place one should give to specific case studies in this volume. It is clear that they must be crucial while studying customary law as a theoretical object; but no discourse should be limited to a series of descriptions of different customary laws.

The following, non-exhaustive list of questions should allow to prefigure various leads:

Does "customary law" locution show a specific mode of social regulation between the juridical and the customary? Is custom a source of law? Or could be considered as an object beyond or before it? Does a specific form of customary law exist despite its different expressions? Does a model of customary law exist - such as the international law?

Which transformations does custom endure when integrated with the "customary law"? Which philosophical implications does codification of custom produce within customary law? Which are the stakes of the very existence of customary law in pluralist and decolonized contexts? What are the relationships between customary law on one side and moral or juridical standards such as human rights on the other? What is the place of customary law within social change dynamics?

Which interactions and which concerns exist about humanities, social sciences and law with respect to custom? Which are the links of customary law with localities, territories, their history and their social displaying? How different disciplines of social and human sciences allow to reflect upon these phenomena and their conflict with law's peculiar formality?

Submissions

The committee and the editors will make their selection from a set of complete papers only. Proposals will not be reviewed.

Papers may be as long as 35.000 characters / 7.500 words. This does not include: the main title, abstracts, footnotes, the author’s presentation etc. Only the main text counts in the total of words.

Papers may be written in French, English and Italian only. They should be sent to the following email addresses altogether, by June 1st, 2019.
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To ensure an unbiased selection, the document must be anonymous. It must be modifiable, therefore .doc files are preferable. Please include in your email a separate document that states your name, affiliation, topics of interests. We should provide an answer by August 1st, 2019. 

Then, selected papers might need some modifications. The final versions of the papers will be due by September 15, 2019. 

 

 


Italian version

La rivista Noesis, giornale del Centre de Recherches en Histoire des Idées dell’Université de Nice, lancia una call for contributions per un doppio volume intitolato “Filosofia del diritto consuetudinario”, previsto per la primavera 2020. Questa pubblicazione è il frutto del convegno internazionale “Les enjeux philosophiques du droit coutumier” organizzato a Maggio 2019 presso l’Université Nice Sophia Antipolis, con la collaborazione dell’Université Côte d’Azur, della MSH-Sud Est e dell’UFR LASH. Gli articoli selezionati con questa call completeranno gli articoli scelti tra i lavori presentati in sede di convegno.

Noesis è una pubblicazione soggetta a peer review che fa riferimento a un comitato scientifico. Gli ultimi numeri sono disponibili presso l’editore Vrin. I numeri precedenti gli ultimi due anni sono accessibili online sulla piattaforma revues.org.

Call

L’espressione «diritto consuetudinario» non indica affatto un oggetto evidente; la call for contributions prova a esplorare e, ove possibile, risolvere le tensioni create dalla giustapposizione di queste due forme di regolazione sociale tanto coesistenti quanto distanti : il diritto e la consuetudine. A tal fine ci si interrogherà in particolare sull’ambiguità che si nasconde dietro il qualificativo di “consuetudinario”. Esso designa una tra le tante manifestazioni del giuridico, oppure una forma a esso estranea, dotata di caratteristiche peculiari e irriducibile al diritto?

La risposta a queste domande dipende senza dubbio da un’esplorazione tanto teorica quanto empirica delle modalità di funzionamento specifiche del diritto consuetudinario. Se questo diritto è definito consuetudinario, è evidentemente perché la consuetudine occupa uno spazio privilegiato in qualità di fonte del diritto. Comprendere le qualità specifiche del diritto consuetudinario significa perciò sforzarsi di capire come questo spazio condiziona la natura stessa del diritto.

Bisognerà perciò interrogarsi sul modo in cui lo spazio dedicato alla consuetudine determina l’esistenza di istituzioni specifiche e di criteri autonomi inerenti ai diritti individuali. Ogni sistema di diritto, a partire dal momento in cui comporta un elemento consuetudinario, deve stabilire i princìpi spazio-temporali e logici della prova consuetudinaria. La Common Law anglosassone e i suoi princìpi specifici non devono tuttavia offuscare i tentativi di individuare e stabilire i princìpi e le peculiarità del diritto consuetudinario, ed è necessario prestare particolare attenzione al modo in cui la consuetudine si colloca nei contesti pluralisti, in cui diversi diritti consuetudinari possono trovarsi in un rapporto di concorrenza. In queste condizioni, l’interazione tra diritto e consuetudine prende la forma di un conflitto normativo più che di un diritto consuetudinario omogeneo.

Esplorare i limiti e il carattere fittizio delle procedure relative alla consuetudine della Common Law può servire da punto di partenza per ri-dispiegare le potenzialità del diritto consuetudinario e metterne in discussione i fondamenti. In particolare, sarebbe interessante studiare le diverse sembianze del diritto consuetudinario in un’epoca in cui il modello della Common Law si impone su diverse scale e in diversi ambiti, come il diritto internazionale; e in cui il diritto consuetudinario si attua in contesti di pluralismo giuridico nel quadro di regioni decolonizzate.

Le implicazioni e conseguenze specifiche relative a questi contesti non possono che portare a interrogarsi sui limiti e sulla flessibilità del diritto consuetudinario. Le variazioni di scala e di ambito intaccano l’essenza del diritto consuetudinario, ammesso che ve ne sia una? Oppure rivelano al contrario una sua natura al di là delle specifiche incarnazioni? Si tratta, inoltre, di indagare l’efficacia specifica del diritto consuetudinario e in particolare di determinare se il diritto consuetudinario riposa sulle stesse forme di coercizione del diritto, e se dispone di istituzioni e applicazioni specifiche. La questione della collocazione della sanzione è, a questo proposito, essenziale.

Proseguendo in queste riflessioni è necessario notare che in ogni diritto consuetudinario la consuetudine è ridotta a sorgente del diritto, e in quanto tale si vede privata di una forma di normatività autonoma. Vi è consuetudine solo quando riconosciuta in quanto tale, secondo i processi canonizzati e inquadrata in istituzioni e criteri definiti dal diritto. In questo caso, la consuetudine non è che una delle possibili fonti del diritto, in concorrenza con altre, e non gode di un’esistenza giuridica se non subordinata.

È il motivo per cui John Austin ha potuto negare così facilmente l’autonomia della consuetudine, sostenendo sulla scorta di Hobbes e contro la scuola storica che la natura stessa del diritto impedisce alla consuetudine di essere efficace al di fuori del suo riconoscimento diretto o indiretto, esplicito o tacito, da parte del sovrano. Una delle ambizioni principali del convegno è appunto di verificare la tesi di Austin, cosa che potrebbe permettere di affrontare la questione della priorità del sostantivo o aggettivo nell’espressione “diritto consuetudinario”. Sottotraccia giace la questione stessa dell’autonomia della consuetudine come forma di regolazione sociale.

Per queste ragioni potremmo essere portati a considerare ciò che scompare e ciò che resta della consuetudine nel diritto consuetudinario, così da comprendere realmente la natura di quest’ultimo. Questo non può che condurci a interrogarci sul tema specifico della codificazione della consuetudine, atto fondatore del diritto consuetudinario. Questa codificazione non è mai, di fatto, un atto neutro, e sarebbe opportuno evidenziare, dalle diverse prospettive possibili, tutte le tensioni che circondano questa codificazione, cristallizzando equilibri di potere o lotte socio-economiche. Un asse di studio interessante, già spesso evocato nelle scienze sociali ma raramente in filosofia, sarebbe quello delle interazioni tra diritto formale e consuetudine nei paesi decolonizzati.

La codificazione del diritto d’altra parte è uno dei momenti in cui saperi e poteri si incontrano con la maggiore intensità. La scuola storica del diritto ha affermato con forza la necessità di inglobare lo studio del diritto all’interno delle discipline umanistiche: l’affermazione può essere allargata oggi all’insieme delle scienze umane e sociali, dall’antropologia all’economia e alla sociologia. Ci interrogheremo perciò sulla possibile collocazione di queste discipline nella codificazione e nell’istituzionalizzazione della consuetudine, sulla legittimità e sui metodi dei loro approcci.

Infine si pone naturalmente la questione dello spazio da dare allo studio degli specifici casi. È evidente che essi dovranno essere centrali nello studio del diritto consuetudinario, ma anche che nessuna riflessione può limitarsi a proporre analisi di diritti consuetudinari differenti.

Il seguente elenco di domande, assolutamente non esaustivo, permette di tracciare alcune piste possibili che possono essere esplorate dai contributi:

L’espressione « diritto consuetudinario » designa una specifica modalità di regolazione sociale tra il giuridico e la consuetudine? I costumi sono una fonte autonoma del diritto? La consuetudine può essere considerata come un al di qua o al di là del diritto?

Esiste una «forma» specifica del diritto consuetudinario malgrado la molteplicità delle sue manifestazioni? Esiste un modello di diritto consuetudinario, come potrebbe essere il diritto internazionale?

Quali trasformazioni subisce la consuetudine quando integra il diritto consuetudinario? Quali implicazioni filosofiche solleva la codificazione della consuetudine nel diritto? Quali implicazioni presenta l’esistenza del diritto consuetudinario nei contesti pluralisti/decolonizzati? Quali sono i rapporti del diritto consuetudinario con gli standard sia morali sia giuridici come lo sono, per esempio, i diritti dell’uomo? Qual è il posto del diritto consuetudinario rispetto alla dinamica del cambiamento sociale?

Quali interazioni e quali implicazioni di potere esistono tra le scienze umane e sociali e il diritto relativamente alla questione della consuetudine? Quali legami intrattiene il diritto consuetudinario con le località, i territori, le loro storie e le loro organizzazioni sociali? Come le diverse discipline delle scienze umane e sociali permettono di rendere conto di queste dinamiche e del loro conflitto contro il formalismo del diritto?

Informazioni pratiche

Gli articoli completi non devono superare le 35.000 battute (per il corpo del testo; esclusi quindi titolo, abstract, note, ecc.). La rivista non valuterà abstract. Gli articoli possono essere scritti in inglese, francese, italiano. Per ulteriori dettagli, a questo link c’è il foglio di stile.

Gli articoli dovranno essere inviati ai tre diversi indirizzi email entro e non oltre il 01 giugno 2019:

Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.">Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..fr, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser., Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

Al fine di valorizzare la neutralità della selezione, chiediamo che il documento (in formato Word oppure openOffice) sia anonimo, e inviato tramite allegato di una mail che indichi nome, cognome e coordinate dell’autore. Una risposta della selezione sarà data entro il 01 agosto 2019.

Agli autori degli articoli selezionati sarà richiesto un piccolo lavoro di editing, in modo da consegnare la versione finale entro il 15 settembre 2019 per l’editing tecnico e l’impaginazione.

 

 

 

 




Appel à contributions pour le numéro 31 de la revue Noesis à paraître en 2018 –

Qu’est-ce que l’Histoire des idées ?

Argumentaire

L’Histoire des idées n’est guère institutionnellement reconnue en France, contrairement à ce qui se passe dans d’autres traditions académiques, italienne, germanique, et anglo-saxonnes notamment. Au XVIIIe siècle, Giambattista Vico dans sa Scienza nuova (1744) appelait de ses vœux une nouvelle science de l’histoire qui serait notamment une « histoire des idées humaines ». Au siècle suivant, Benedetto Croce en Italie, Wilhelm Dilthey, Max Weber ou Georg Simmel en Allemagne, pratiquaient l’histoire des idées via le dialogue entre l’histoire, la sociologue et la philosophie. Au XXe siècle, le philosophe américain Arthur Lovejoy installait la discipline dans le paysage académique à la fois par ses travaux et par la création en 1940 du Journal of the History of Ideas.

Que l’histoire des idées, n’ait pas, en tant que telle, de visibilité académique en France ne signifie pas pour autant qu’elle n’y est pas pratiquée. La question de l’histoire des idées est fortement présente dans le champ de l’histoire sous la forme de histoire culturelle, de l’histoire des mentalités ou des représentations, sans parler de toutes les disciplines qui la rencontrent inévitablement, comme l’histoire des sciences, de la philosophie, du droit, ou de l’art. Si bien qu’elle est à la fois nulle part et partout, sans unité ni périmètre défini. Est-elle une préoccupation diachronique partagée par différentes disciplines mais déclinée différemment selon les champs, ou une méta-discipline transcendant les partages disciplinaires ? Existe-t-il des propositions unifiantes satisfaisantes comme celles que propose en Allemagne l’Histoire des concepts de Reinhardt Koselleck (Begriffsgeschichte) ou celle de l’École de Cambridge autour des travaux de J. G. A. Pocock et Quentin Skinner qui étudient l’histoire des concepts dans le contexte des actes de langage et les considèrent dans leur force illocutoire ?

L’histoire des idées a fait l’objet de plusieurs types de critiques. On lui a reproché de postuler une histoire autonome des idées, alors que celles-ci n’existent qu’en fonction de l’histoire des contextes socio-historiques (Mannheim, Idéologie et utopie, 1927). On l’a accusé de détacher les idées de l’action : « ce à quoi je réagis, écrit Foucault dans L’Archéologie du savoir, est cette rupture qui existe entre l’histoire sociale et l’histoire des idées. Les historiens des sociétés sont censées décrire la manière dont les agents agissent sans penser, et les historiens des idées la manière dont les gens pensent sans agir ». A ces accusations d’idéalisme s’ajoute celle, très différente, d’historicisme. Si, ainsi que l’écrit Paul Veyne « l’histoire des idées commence vraiment quand on historicise l’idée de vérité » (Les grecs croyaient-ils à leurs mythes ?), ne conduit-elle pas au réductionnisme et au relativisme ?

Ce dossier de Noesis entend réfléchir sur la nature, les fonctions et la valeur de l’Histoire des idées selon plusieurs perspectives qui s’inscriront principalement dans les 4 axes suivants :

- Approche généalogique. D'un point de vue historique et conceptuel, il s'agira d'étudier l'apparition de l’Histoire des idées, les étapes de sa constitution, ainsi que ses inscriptions institutionnelles.

- Perspective comparatiste. Que recouvre les expressions d’History of Ideas, de Storia Intellectuale, de Geistgeschichte, etc.

- Études monographiques de théoriciens de l’Histoire des idées

- Analyses critiques des objets, des méthodes de l’histoire des idées et de sa place dans le champ du savoir.

Soumission des articles

Les articles, rédigés en français, doivent comprendre :

* Le titre de l’article

* L’article de 25000 signes (espaces compris) + ou – 20%

* Son résumé (700 signes, espaces compris, maximum)

* Le nom de l’auteur ou des auteurs

* une présentation succincte de l’auteur ou des auteurs (100 mots maximum) Elles seront envoyées au format pdf à Carole Talon-Hugon : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Les propositions feront l’objet d’une double lecture à l’aveugle par le comité de rédaction de la revue Noesis.

 

Date limite d’envoi des articles : 30 juin 2018

Les réponses seront communiquées le 15 juillet 2018

 



Appel à contributions pour le numéro 30 de la revue Noesis à paraître à l'automne 2017 – Europe

Argumentaire

La revue Noèsis consacrera son trentième numéro au thème de l’Europe. Ce choix résulte du constat de l’accumulation de ce qu’il est convenu d’appeler « les crises européennes ». Dites « grecque », « des dettes souveraines », « de la zone Euro », « ukrainienne », « des réfugié-e-s », « sécuritaire » ou encore « Brexit », leur violence et leur imbrication sont telles qu’elles paraissent relever d’une même crise plus profonde de l’Europe en tant que telle, et requérir, pour leur compréhension et leur surmontement, un examen global.

La forme de ce constat n’est certes pas nouvelle : en 1935 déjà, dans La crise de l’humanité européenne et la philosophie, Husserl thématisait « la crise de l’humanité européenne », faisant d’ailleurs aussi remarquer la récurrence « du thème (…) de la crise européenne »[1]. Mais précisément, la récurrence de cette récurrence ne prouve-t-elle pas l’ancienneté et la radicalité de la crise actuelle de l’Europe, l’ancienneté de son irrésolution aussi et donc la nécessité, pour la surmonter, de répéter, différemment, la tentative de la comprendre ?

Le titre de ce numéro – Europe – signifie la proposition, pour cela, de procéder avec la simplicité adéquate à la radicalité supposée de la crise, en demandant pour commencer ce qu’il faut comprendre sous le nom d’Europe. Il s’agit d’élaborer collectivement un concept correct d’Europe, dont nous savons au moins que, loin de la formulation proposée par Husserl comme « téléologie historique des buts infinis de la raison »[2], il intègre l’incompréhension européenne de la situation européenne, et qu’il requiert donc, pour son élaboration, les perspectives des extériorités de l’Europe et une autre méthode.

Pour organiser l’élaboration, six axes de réflexion sont proposés.

Le premier peut être dit de philosophie générale : il s’agira de poser la question « Qu’est-ce que l’Europe ? » comme une question philosophique, de la problématiser et d’y répondre.

Il faudra tenir compte pour cela de ce que l’Europe a régulièrement été conceptualisée philosophiquement. Suivant un deuxième axe de réflexion, relevant de l’histoire de la philosophie, il s’agira donc d’expliquer les concepts d’Europe de Leibniz, de Kant, de Hegel, de Marx, de Nietzsche, de Husserl, de Heidegger, d’Arendt, de Fanon, de Patočka, de Derrida, d’autres encore, et de procéder à la généalogie de la conceptualisation de l’Europe.

Le troisième axe de réflexion proposé peut être dit géophilosophique. De même que le constat de l’incompréhension européenne de la situation européenne, le simple rappel que l’Europe est dans le monde rend nécessaire de poser la question « Qu’est-ce que l’Europe ? » depuis son dehors aussi. Que seraient donc un concept africain d’Europe, un concept amérindien, arabe, chinois, indien ou papou d’Europe, et un concept d’Europe d’autres et d’ailleurs encore ? Il faudra tenir compte de ce que les modes d’extériorité de l’Europe sont eux-mêmes divers, et la penser aussi depuis les zones floues de ses délimitations géographiques ordinaires, depuis les extériorités violemment construites en dedans et depuis d’autres extériorités encore. Que seraient donc un concept balkanique d’Europe, un concept immigré, juif, musulman, noir, réfugié, russe, turc, tzigane d’Europe, et un concept d’Europe d’autres et d’ailleurs encore ?

Le quatrième axe de réflexion proposé est épistémologique. A quelles conditions logiques et méthodologiques un concept philosophique d’Europe est-il possible ? A quelles conditions un concept philosophique est-il possible, en général, d’objets géographiques et géopolitiques tels que les continents, les pays ou les peuples ? Que seraient les éléments d’une méthode géophilosophique, pourra-t-il également être demandé, éminemment avec Deleuze et Guattari ?

Le cinquième axe de réflexion proposé peut aussi être dit épistémologique, mais il ne relève plus tant de l’épistémologie de la philosophie que d’une épistémologie de l’interdisciplinarité, que la multidimensionnalité de l’Europe rend nécessaire : que seraient un concept juridique d’Europe, un concept anthropologique, économique, géographique, historique, psychanalytique ou sociologique d’Europe, et aussi, outre le droit et les sciences humaines et sociales, un concept artistique d’Europe, architectural, dansant, littéraire ou musical ? Comment s’articuleraient-ils ?

Il s’agira enfin, conformément à la dimension intrinsèquement politique à la fois de la philosophie et d’une réalité telle que l’Europe, d’assumer politiquement la prétention structurante de la philosophie, c’est-à-dire, quant à l’Europe, sa prétention constituante, et d’engager une réflexion de type programmatique. Le projet d’une République européenne, ou de Lois européennes, peut-il avoir un sens ? Faut-il une constitution de l’Europe ? Si oui, quelle doit-elle être ? La norme d’un concept correct d’Europe peut-elle être celle d’une institution correcte de l’Europe et de l’action la créant ? L’unité politique de l’Europe est-elle possible avec les hétérogénéités européennes ? Pourrait-elle, et comment, être agencée à d’autres unités géopolitiques ? Que serait la bonne politique européenne, en Europe et relativement au monde ? Quelles transformations produire, et comment, pour la réaliser ? Un peuple européen existe-t-il seulement ? Si non, peut-il, et comment, se créer ? Les intériorités convenues de l’Europe, par exemple les Etats-nations, n’ont-elles pas été construites comme des extériorités relatives et inconciliables ? Y aurait-il des concepts allemand, anglais, espagnol, français, hongrois ou polonais d’Europe, qui seraient contradictoires ? Il faudra intégrer ici l’indissociabilité de la géophilosophie et de ce qui pourrait alors être appelé « la sociophilosophie », et exprimer les altérités non géographiques de l’Europe. Que seraient donc un concept féminin d’Europe, un concept homosexuel, jeune, prolétaire d’Europe, et d’autres encore ?

Il est entendu que, si, reconnaissant l’autonomie relative de la réflexion politique, un axe lui est consacré, la réflexion politique est transversale, et que chaque contribution, dans chaque axe de réflexion, pourra comporter une ou plusieurs propositions politiques. Elles seront rassemblées et comparées en conclusion, et, si possible, confrontées dans un colloque projeté au moment de la publication.

Il est également entendu qu’une telle transversalité vaut pour tous les axes de réflexion : ils sont proposés sans prétention d’exhaustivité et suivant des distinctions et un ordre modifiables dans le cours de la réalisation du numéro.

Indications pratiques

Il est demandé que les propositions soient d’abord énoncées sous la forme d’un résumé de l’article prévu, en 3500 signes au maximum, dans un document en format Pdf, envoyé à l’adresse Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. avant le 15 septembre 2016. Pour favoriser la neutralité de la sélection, il est également demandé que ce document soit anonyme, et transmis dans une pièce jointe à un message électronique indiquant quant à lui le nom et les coordonnées de l’auteur-e. Une réponse sera donnée avant le 30 septembre 2016.

Il sera ensuite demandé aux auteur-e-s dont les propositions auront été sélectionnées de transmettre leurs articles, en 35000 signes au maximum, avant le 31 janvier 2017. Dans le cas où des modifications paraîtraient nécessaires, un compte-rendu de lecture leur sera remis avant le 15 mars 2017.

Il sera enfin demandé aux auteur-e-s de donner les versions définitives de leurs articles avant le 15 mai 2017, la publication du numéro étant prévue en septembre 2017.

Les résumés et les articles pourront être écrits en anglais ou en français.

Toute demande d’information complémentaire peut être transmise à Salim Abdelmadjid, qui dirige l’édition du numéro, à l’adresse suivante : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

 


[1] Husserl, La crise de l’humanité européenne et la philosophie, trad. N. Depraz, Paris, Hatier, 1992, p. 50

[2] Id., p. 78

 

CRHI
Université Nice Sophia Antipolis
MSHS Sud-Est